Fourches patibulaires de Bodilio

Référent : Mathieu Vivas  - Publié le 24/10/2025  - Dernière modification le 04/11/2025

Contributeurs : Mathieu Vivas



Bulat-Pestivien, Fourches patibulaires de Bodilio, Vestiges d'une colonne dans la cour du manoir
Source : M. Vivas 2022
Bulat-Pestivien, Fourches patibulaires de Bodilio, Proposition de restitution d'une colonne
Source : M. Vivas 2022
Bulat-Pestivien, Fourches patibulaires de Bodilio, Proposition de plan
Source : M. Vivas 2022
Bulat-Pestivien, Fourches patibulaires de Bodilio, Proposition de restitution 3D
Source : M. Vivas, M. Faure 2022
Bulat-Pestivien, Fourches patibulaires de Bodilio, Proposition de restitution 3D (M. Vivas, M. Faure)

Adresse :

Musée des manoirs bretons 22 160 Bulat-Pestivien
BULAT-PESTIVIEN

Ouvert au public : Oui

  • Identité
    • Localisation : France, Bretagne, Côtes-d'Armor, Bulat-Pestivien
    • Site internet : https://www.manoirdebodilio.fr/

    • Date de Construction : XVIe siècle (?)
    • Période de fonctionnement : XVIe (?)-XVIIIe siècle
    • Particularités :

      Botillio, Botilliau, Bodeillo, Bodeliau… autant d’orthographes qui rendent difficile l’étude d’une seigneurie qui se retrouve, sur la carte IGN actuelle, grâce au nom de Bodilio. Si plusieurs érudits se sont intéressés à elle, le fait qu’ils ne mentionnent que rarement leurs sources entrave l’enquêteAncre [1].

      Des premiers seigneurs de Bodilio semblent apparaître au milieu du XVe siècleAncre[2], époque à laquelle un manoir voit également le jour[3]. Ils sont présents, jusque dans le deuxième quart du XVIe siècle, dans les monstres d’armes de l’évêché de CornouaillesAncre[4]. Au milieu du XVIe siècle, la famille du Combout devient seigneur de Bodilio puis, dans le premier quart du XVIIe siècle, par mariage, la seigneurie de Bodilio revient aux Tinténiac – une famille de seigneurs locaux tantôt nommés barons, tantôt marquis de Quimerc’h. Au XVIIIe siècle, et par mariage également, la seigneurie appartient au marquis du PoulpryAncre[5] avant de devenir la propriété de la famille du Cleuz du Gage puis de celle de Kerouartz.

      Alors que la juridiction de Bodilio apparaît sans plus de précision dans un aveu de 1505, celui rendu en 1552 par Ollivier du Comboult mentionne que le seigneur de Botdillieau a le droit de haute et basse justice et que la « justice patibulaire » est rendue dans un champ nommé la Grande GaraineAncre[6]. Aussi, il faut attendre le début du XVIIe siècle pour que des fourches patibulaires soient plus clairement mentionnées. Ainsi, dans un aveu du début du XVIIe siècle, Maurice du Combout évoque « Une Grande Montaigne nommée la [garenne] Mené bras ou sont plantes les patibulaires de ladite chatellenye de Bodeilleau a quatre pots de tout temps immemorial ». Dans son aveu de 1619, Alain du Combout déclare toujours cette « justice patibulaire à quatre posts ».

      La carte dite de Cassini, lors du levé de 1782-1783, installe des fourches patibulaires à trois piliers sur une colline à l’ouest du manoir de Bodeliau. Si le cadastre de 1832 ne replace pas la structure de pendaison, il positionne toutefois le manoir de Bodeillo, deux localités nommées La Garenne et la colline Menez BrasAncre[7]. Le plan IGN actuel garde souvenir de ces lieux, avec quelques variantes orthographiques toutefois.

      L’enquête permet donc de certifier que les seigneurs de Bodilio possédaient au milieu du XVIe siècle des fourches patibulaires, à environ 1 km à l’ouest de leur manoir, au bord d’une voie de communication et à environ 280-290 m d’altitude. Cette position leur permettait de visuellement communiquer sur leur autorité et leur pouvoir car, à proximité, les seigneurs de Pestivien jouissaient de fourches patibulaires à quatre piliers et ceux de Coatgoureden possédaient la justice moyenne et basse. S’il est impossible de connaître la morphologie de la structure de Bodilio, le fait qu’elle appartienne à des marquis invite à restituer 4 piliers, tout au moins pour le XVIe siècle.

      Aujourd’hui, seuls demeurent neuf blocs cylindriques taillés dans du granit gris local de Bulat. Pour huit d’entre eux, ils ont été remontés en une seule colonne entre le manoir et la métairie à une date qu’il reste difficile à préciser (après la Révolution française ?). D’une hauteur de 3,36 m, le pilier est composé d’une base d’un diamètre de 0,73 m et de sept tambours (de 0,38 à 0,53 m de hauteur), moins larges, de 0,54 m de diamètreAncre[8]. Le dernier tambour présente deux logettes qui réceptionnaient les poutres patibulaires. Parce que positionnées selon un arc de cercle respectant un angle à 90°, ces deux logettes prouvent que la structure se composait de quatre piliers. La colonne se termine par un pinacle décoré, ici un cône surmonté d’une boule. Par comparaison avec d’autres structures de pendaison, en particulier celle de Kérinan (Languédias, Côtes-d’Armor) et celle de Quéménet (Kerlézanet, Finistère), on peut supposer que les fourches patibulaires de Bodilio présentaient un plan carré de 3,50 m à 4,80 m de côté ainsi qu’une hauteur de piliers avoisinant les 3,90 m-4 m.

      *** 

      Ancre[1] Pourtant, aux AD des Côtes-d’Armor, 87 pièces sont enregistrées sous la cote E 1533 (seigneurie de Bodiliau) et la cote B 1974 renvoie, avec des documents datés de 1642 à 1790, à la cour seigneuriale de Bodiliau (feuilles et registres d’audiences, dépôts civils et minutes). Nous remercions ici J. Caouën et M. Morel pour leur aide quant à l’étude des fourches patibulaires de la seigneurie de Bodilio.

      Ancre[2] Le premier seigneur mentionné, le noble écuyer Hervé de Botiliau, le serait en 1456 (Caoën 2013, p. 36).

      Ancre[3] Morel 2004.

      Ancre[4] Comme, par exemple, Jacques de Botylyau, archer en brigandine qui a deux chevaux, avec un « autre archer en sa compaignie » (Montre de l’Évesché de Cornouailles en 1481, p. 369 ; Montre générale de 1481, p. 71 et 84). Le 8 janvier 1505, Maurice de Botileau déclare tenir le manoir et ses appartenances, maisons, jardins, prés, prairies, parcs, clôtures, bois, franchises, moulin et garennes situés en la paroisse de Pestivien (Archives Départementales de Côtes-d’Armor, fonds Kerouartz, cote 85 J ; Caoën 2013, p. 36).

      Ancre[5] Sur les différents seigneurs, on pourra se reporter aux Arrêts de maintenue de noblesse, éd. Rosmorduc 1896, t. II, p. 160-167, p. 187, p. 192. Plusieurs documents conservés aux archives départementales de Loire-Atlantique permettent également de suivre la seigneurie (AD Loire-Atlantique, B 1056 (droits de guillemette du Drenec (1680-1687)) ; B 2436 aveu de René de Tinténiac (1er juillet 1656)).

      Ancre[6] L’ensemble des documents cités dans ce paragraphe sont conservés aux Archives Départementales de Côtes-d’Armor sous la cote 85 J. Il s’agit du fonds dit de Kerouartz qui, à l’heure actuelle, n’est pas consultable car en cours de traitement archivistique. Toutefois, il a été étudié par J. Caouën que nous remercions vivement pour son aide. On pourra également se reporter à Caouën 2013, p. 36 et suiv.

      Ancre[7] Cadastre de 1832, AD 22, 3 P 28 (Commune de Bulat-Pestivien), Section B, 2e feuille. Les fourches patibulaires sont donc probablement détruites aux alentours de la Révolution française et, probablement, entre 1792 et 1802, époque durant laquelle le domaine appartient à un métayer (Morel 2003).

      Ancre[8] Le dernier bloc conservé à l’arrière du manoir présente les mêmes dimensions.

       


    • Fonctions :
      • XVIe siècle (?) À XVIIIe siècle - Lieu de pendaison

        • Ressort : Seigneurie de Bodilio
  • Dates-clés
    • 1546 - Première mention d'un seigneur de Bodilio (noble écuyer Hervé de Botiliau).

    • v. 1550 - La famille du Combout devient seigneur de Bodilio

    • 1552 - Mention de la "justice patibulaire" dans un aveu rendu par Ollivier du Comboult

    • vers 1601-1615 - La famille de Tinténiac devient seigneur de Bodilio

    • 1619 - Mention d'une "justice patibulaire à quatre posts" dans un aveu rendu par Alain du Combout

    • à partir de 1701 - Changement de détenteur

      Au XVIIIe siècle, la seigneurie appartient au marquis du Poulpry avant de devenir la propriété de la famille du Cleuz du Gage puis de celle de Kerouartz.

  • Personnes liées à l’établissement
  • Statistiques
  • Ressources

    • Bibliographie
      • Caouën J. (2013) : « Fondation de la chapelle Saint-Urbain à Pestivien en 1696 et les premiers seigneurs de Bodilio », Pays d’Argoat. Revue d’Histoire et d’Archéologie des cantons d’Argoat, n°60, 2ème semestre, p. 34-39.

        Le Tirrand L. (1971) : Miettes d’histoire et de légendes. Bulat-Pestivien, Bulat-Pestivien.

        Morel M. (2004) : «  Le manoir de Bodilio en Bulat-Pestivien », Pays d’Argoat. Revue d’Histoire et d’Archéologie des cantons d’Argoat, n°42, 2ème semestre


    • Archives
      • Sources non éditées

        A.D. Côtes-d’Armor, 85 J, Fond de Kerouartz.

        Sources éditées

        Arrêts de maintenue de noblesse, éd. Rosmorduc M. de (1896-1905) : La noblesse de Bretagne devant la Chambre de Réformation (1668-1671) : arrêts de maintenue de noblesse, Saint-Brieuc, 4 vol.

        Montre de l’Évesché de Cornouailles en 1481,  éd. C.-P. de la Poix Fréminville (1852) : Antiquités de Bretagne : Finistère, p. 316-378 ; Montre générale de 1481, éd. Torchet H. (2011), Paris.

        Sources iconocartographiques

        Carte dite de Cassini, N°157, Feuille 171 (levé entre 1782-1783 et publication de 1789 à 1815).

        Cadastre de 1832, Archives départementales des Côtes-d’Armor, 3 P 28 (Commune de Bulat-Pestivien).